Ca aurait pu être magique...
Hé oui cher lecteur, peu nombreux, mais assidû, tu
te doutes bien que les "jours de glande" sont terminés depuis le
dernier message et que la routine a repris ses droits, voire a un peu
abusé cette semaine.
Je ferai un message spécial sur le concert de Mopa, je vais pas tout mélanger... La semaine était assez longue (en
sorte de prélude pour ce qui m'attend dès demain... formation d'une
semaine, programme pas prêt, 5 participants injoignables) et j'étais vraiment fatiguée, un peu bonne à rien, j'avoue.
C'est sans doute pour ça que j'ai décidé hier de faire un tour à Ikéa (ben
oui, hein, après tout... pourquoi y faire un petit tour pour regarder
et finalement repartir avec un buffet sur ton dos dans le S-Bahn). J'achète deux trois bricoles sur lesquelles je lorgne depuis longtemps (mais comme j'ai trop de sioux en ce moment... je peux enfin ranger ma cuisine correctement) et
j'arrive au coin des meubles d'expo et je trouve LE miroir. Bon, c'est
une porte de placard, mais s'il est contre le mur, ça reste un miroir
d'un mètre sur deux, dimension fort honnête, tu le reconnaîtras. Et me
voilà à le regarder sous toutes les coutures, ok, un pétou dans un
coin, pas grave, réfléchir, putain 15€, ah non, c'est n'importe quoi,
je suis en vélo et faudrait un camion, ressaisis-toi bordel, le truc de
fou, c'est un miroir de salle de danse quoi, trop beau, nan, nan, c'est
vraiment pas raisonnable ça... Je l'achète.
Je me répète que je suis vraiment pas raisonnable (et j'entends en écho la voix de ma mère)
sur tout le trajet jusqu'à la gare, 5kg sur le dos et LE miroir sur le
chariot. Je trouve des hommes de ménage devant la gare et demande de ma
petite voix si leur pause clope va durer longtemps parce que ce serait
suuuuper gentil de garder un oeil sur mes achats pendant que je repars
deux kilomètres plus loins chercher mon vélo que j'ai lâchement
abandonné. Kein Problem.
Une fois sur le quai, non sans avoir
transpiré dans mon manteau d'hiver, je contemple mon chargement et me
dis que je n'arriverai pas à tout rentrer dans le train avant que les
portes ne se ferment. Oh que vois-je là-bas, un petit groupe de
policiers qui n'ont rien d'autre à faire que d'attendre une pauvre
jeune fille trop chargée. Hop, le policier rentre mon miroir dans le
train pendant que j'essaie de faire tenir le vélo (à ce
stade, j'en suis à 2 litres de sueur, mais je peux souffler dix minutes
avant de demander à quelqu'un qui descendra à la même station de bien
vouloir m'aider).
Katrin n'a pas attendu que je demande, sans
doute trop attendrie par cette petite française écheveulée et en nage,
croulant sous ses achats, et me propose de m'aider, si je descends
comme elle à Sonnenallee. Mon étoile brille ce soir. Et nous voilà
parties jusque chez moi, elle, me racontant sa vie parce que bon, j'ai rien contre les étrangers mais voilà, et je suis allée à Paris une fois, à Disneyland, et moi, priant pour que LE miroir ne se fende pas à cause du pétou dans le coin et de ces putain de pavés berlinois.
Ma
vigilance, endormie quelques secondes après la pause clope au feu
rouge, est réveillée par ce petit bruit métallique, presque
imperceptible, qui accompagne la descente du trottoir. Oh non. Pas à 15
mètres de chez moi, c'est trop mesquin.
Je déballe fébrilement LE
miroir dans l'entrée et découvre au fur et à mesure que je déchire le
carton une splendide fissure, régulière, étincelante, qui s'élance
jusqu'à mi-hauteur.
*
J'ai depuis cet instant un sentiment d'échec redoutable qui ne me quitte pas, comme si j'avais gâché bien davantage que deux mètres carrés de miroir.